L'Ordre Thalassien
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Forum de l'Ordre Thalassien, Guilde JDR sur Les Clairvoyants.
 
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 Eloge de la facilité

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Ael




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MessageSujet: Eloge de la facilité   Eloge de la facilité EmptyDim 15 Jan - 20:44

Pour la première fois depuis... toujours, en fait, il y a eu cette seconde d'hésitation qui a tout changé.


Elle savait, évidemment, qu'elle n'aurait jamais dû revenir. Elle savait qu'elle avait été négligeante, qu'elle avait laissé des traces. Et comme à son habitude, quand dans sa tête de chat une idée s'installe et fait son trou, il n'y a eu plus rien à faire. Elle devait rentrer chez elle, revoir son antique demeure, retrouver son père.

Mais de père, point. Les fenêtres battaient, bancales, brisée, dans la brume. Et le monde était vide.


Il était mort, sans doute. Mort de l'avoir revue, peut-être... qu'importe. Elle se sentait un peu plus creuse encore. Jusqu'à quel point peut-on être vide ?


Et puis elle a perçu leur présence, en demi-cercle, assez en avance pour qu'elle se sauve, comme d'habitude. Mais il y a eu cette seconde d'hésitation, pour la première fois. Comme si elle avait déjà trop couru. Comme si, après tout, malgré tout, le moment était venu de s'arrêter.

Le temps qui lui restait, elle l'a utilisé à faire la seule chose sensée en son pouvoir. Elle a effacé l'unique souvenir de valeur qui lui reste, la seule trace que son passage dans le monde n'a pas été vain, que Mu'ru ne s'est pas trompé. Elle oublie son fils, en... trois secondes ? Trois années à ne penser qu'à lui pour l'oublier en un vingtième de minute. Linthas, Linthas, Lint... Plus rien.


Fatalement, un examen poussé révèlera des trous, mais qui pourra dire ce qu'ils contenaient ? Pas elle, non. Non, pour elle, il n'a jamais existé. Sa mémoire se bouche, trouve des explications rationnelles quand elle le peut, ou entreprend d'effacer plus d'événements encore pour justifier l'absence, le gouffre immense.


Cela fait tourner la tête. Elle tousse. Quelques gouttes de sang dans sa main, comme depuis quelques jours, à chaque fois.

Putain de peste. Saloperie de Gangrène, qui a eu son satané mariage avec son salopard de Capitaine, finalement. Elle lui manque. Saleté.


Jah, Kaeldar, Chander, Loan, Seire, Ogar. Elle se souvient d'eux, de sa première vraie vie. Puis tous les autres, dans l'Arcane surtout, mais pas seulement. Maÿla, la seule à ressembler à une amie depuis... depuis toujours ? Les hésitations de Narmë, la colère de Van Tassel, l'étreinte de Seleyne, ses yeux qui se ferment devant Morch, la candeur d'Otto, la folie de Ladimore, le baiser volé à Brisargent, l'intelligence froide de Felindarn, la bêtise musclée de Zargh, les bêtes d'Akhem, le langage de Théliara, le mépris de Jaleb, différent de celui d'Isaelas, la curiosité d'Ombral et Shelen, Luisétoile qui avance, là, au moment où elle évoque le Maître, son dernier maître.

Il n'est pas seul. Il a l'air d'un putain de cul béni, presque contrit d'être là, en si mauvaise compagnie que la sienne. L'Ordre Thalassien fait aussi partie de la chasse, ce n'est pas si étonnant, non. Ah, Shelen. En d'autres temps et d'autres lieux, ils se seraient quand même haïs. Quel dommage, n'est-ce pas, qu'il soit plus jeune qu'elle... et qu'elle ait fait tuer son mentor.


Il lui semble un instant que rien n'a vraiment de sens et cela se voit sur son visage. Son indécision est mal interprétée. Les mages présents se préparent à intervenir, à l'empêcher de lancer un sort. Mais elle n'en a plus l'intention. Quelque chose a disparu en elle, une flamme qui la poussait en avant, à fuir, à vivre.


Le mépris comble le vide. Elle se redresse, les épaules bien droites, les lèvres rougies d'un peu du sang qu'elle perd à chaque respiration et elle fixe celui qui l'a trahie. Par la Lumière... quelle perversité que d'être arrêtée par celui que l'on pourrait dénoncer mille fois. Et comment pense-t-il la faire taire ? Parce qu'ils chercheront à la faire avouer, bien sûr. Longuement. Douloureusement.


Elle n'entend plus ce qu'ils disent. Il lui apparaît soudain qu'elle ne dira rien, parce qu'elle a trouvé son maître. Son dernier maître. Et qu'il faut lui faire plaisir. Elle en vient presque à sourire, presque. Mais ses épaules s'affaissent un peu. Sera-t-elle à la hauteur ? Parviendra-t-elle à ne pas le trahir, comme elle a déçu tous les autres ?


Les sons sont revenus d'un coup et elle acquiesce quand on demande la confirmation de son nom. Des années que Solyelle avait disparu. Etrange d'être celle-là à nouveau. Etrange sensation de manque, comme si un rouage prédominant échappait à sa compréhension du monde. C'est vrai... que dire quand on lui demandera pourquoi avoir fait exécuter Aldrae Paraelis, Eminence Grise de Rommath à Lune d'Argent il y a trois ans ?


Qu'importe. Elle dira ce que son maître voudra qu'elle dise, elle criera quand il le désirera, pleurera pour ses sourires, gémira pour son plaisir. Le reste, tout le reste, n'a plus d'importance.


Elle réalise quand on l'entraîne qu'elle porte une robe blanche. Presque une robe de mariée. Cela a un sens, sans doute. Mais déjà elle n'est plus capable de le voir. Elle doit être parfaite, une dernière fois.
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Shelen Luisétoile

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MessageSujet: Re: Eloge de la facilité   Eloge de la facilité EmptyDim 15 Jan - 20:46

« Avançons. »
Cela n'est pas à leur goût : qui de sensé aurait l'idée saugrenue de faire confiance à un saltimbanque qui se rit de tout ce qu'il y a de sacré, qui prétend que tout est mensonge, à commencer par lui-même ? Tous les regards se tournent alors vers Kashal qui, après un court instant, acquiesce en silence. Il murmure : « Ordre du Maréchal ». La troupe se met en alors route sans broncher ; un soupir exaspéré est le seul semblant de protestation tandis que des regards inquiets se croisent, mais tous espèrent contribuer à ce qui devra redorer le blason de l'Ordre : capturer une « dangereuse criminelle ». Dans l'air vif de l'aube, la brume et l'herbe mouillée ont bientôt raison de leurs tenues mal adaptées. Ils glissent, ralentissent, tant est si bien que leur général a peine à distinguer la robe blanche qui avance en flottant devant eux, inlassablement, et commence à se fondre dans le brouillard.

Shelen s'arrête d'un coup. Le rideau de brume est tout à coup moins dense, et elle l'a vu. Pourtant, lotie en contrebas, elle feint de n'avoir rien perçu, adopte une attitude de recueillement. Il la dévore des yeux ― yeux d'enfant qui vient de trouver la pièce maîtresse manquante à sa collection de joujoux : une ruine, bel et bien vivante. Kashal se place à ses côtés, les bras croisés, prêt à recevoir les ordres et à les transférer (il avait bien entendu été convenu que ce fou de Nadir-Shelen n'aurait aucune autorité sur les bien-aimés vassaux du Maréchal ― les imbéciles). Lorsque le prêtre se retourne, il aurait juré avoir vu un sourire dessiné d'étoiles dans le chaos obscur noyant ses traits. Un seul signe de la main lui suffit pour que le général se retourne vers les quelques elfes les accompagnant et désigne un côté et l'autre de la pente abrupte encerclant la maison. L'herbe et les feuilles bruissent alors qu'ils se placent ; lui plonge vers sa proie.

Comme un ange descendu des cieux pour annoncer la bonne nouvelle, Shelen traverse les voiles successifs de la brume, se rapprochant du sol et devenant chaque fois plus réel. Il implore sa victime et gazouille : « Solyelle, Solyelle... ». Mais l'anti-vierge semble farouchement hermétique à ce plaint-chant, et sans même en avoir conscience. Quand son rival finit sa chute, à un mètre au-dessus du sol et à ses côtés, il la toise d'un air sévère. « Allons Solyelle, cette farce est finie. » Pas de réponse. Exaspéré par cet absolu refus de participer à sa mise en scène, il dresse un bras. Dans les hauteurs alentours, les mages se préparent à geler ses chevilles fragiles, les chasseurs à percer ses flancs amaigris, les démonistes à nouer sa langue toujours perfide. Mais ce ne sera pas nécessaire : déjà, Kashal surgit dans son dos tandis que sa dague caresse la gorge de la traîtresse.
« Êtes-vous Solyelle ?
Oui. »

Shelen la fixe d'un air mauvais. Toujours ses caprices, toujours cet art de le ridiculiser dans un moment de gloire. Sans plus de cérémonie, Kashal attache les mains d'Ael dans son dos grâce à un dispositif arcanique qui préviendra également l'utilisation de sorts. Le prêtre observe un instant la robe immaculée autour de laquelle le brouillard s'évapore alors qu'un rayon de soleil baigne la troupe. Mais pas lui. Il les maudit tous, intérieurement. Et elle, elle le paiera.


Dernière édition par Shelen Luisétoile le Dim 15 Jan - 22:55, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Eloge de la facilité   Eloge de la facilité EmptyDim 15 Jan - 20:48

La sotte s'est évanouie.

Il se dégage un fort contraste des deux protagonistes de cette scène. La pièce est ronde et haute ; elle est au milieu de deux couloirs parallèles, ainsi beaucoup de spectateurs observent l'improbable couple qui l'occupe. Pourtant, l'un d'entre eux, l'homme, est bien connu du département des affaires criminelles de la Flèche de Solfurie. Il s'agit de Shelen Luisétoile, dans son éternelle et impeccable robe rouge, l'un des prêtres à qui l'on a confiée la dernière lubie du service : la réinsertion de criminels en société. Cela va sans dire qu'adaptation va de pair avec lavage de cerveau intensif et perte de toute personnalité ― mais ne nous attardons pas dans le politiquement incorrect.
Si ses collègues devaient en faire le portrait, ils mettraient très certainement en avant son air de grand écolier un peu trop sérieux, son calme, sa douceur, la tendresse presque avec laquelle il soumet la psyché de dangereux criminels. Ce travail ne semblait pas fait pour lui, et pourtant il y excellait. Et ce même homme se dresse là, les bras croisés, l'air absent, en train d'observer cette elfe nue. Ses poignets sont retenus par des fers fixés au mur, bien au-dessus de sa tête ; celle-ci penche d'une telle manière vers l'avant que l'on serait tenté de croire que sa nuque est brisée. Ses tibias se chevauchent de façon grotesque et l'on se demande comment elle pourrait tenir à genoux sans être attachée tant elle est maigre. Est-elle morte ? Non, il ne semble pas. Elle transpire abondamment. Cependant, le spectateur non informé ne sait rien de son triste état de santé et de ses fièvres. Maigreur, sudation et soumission. Quel nu obscène ! Qui a pu vouloir l'exposer ici, aux yeux de tous ? Ah, vraiment, son idée à lui ? Voilà qui est curieux.

Que c'est difficile de conserver son expression habituelle tandis que des badauds bouffis font sans cesse des vas-et-viens autour de soi. Qu'il est pénible de renoncer au triomphe de sa domination sur autrui quand autrui n'est pas même conscient. Et pourtant, il l'observe, patiemment. Il rejoue avec elle l'éternelle parade de l'amant attendant le réveil de sa belle ― et elle l'est, en dépit de sa silhouette décharnée et quelques dents en moins.
Un bruit de succion trouble le rythme des pas résonnant depuis les couloirs, un filet de salive retourne à la fosse de laquelle il n'aurait pas dû tenter de s'enfuir. Ael cligne des yeux, le regard hagard. Elle finit par distinguer la robe bordeau du fond cramoisi et les cheveux blonds des dorures ornant les murs. Rien dans ses yeux ne trahit autre chose qu'un intérêt poli, pourtant il peut enfin se délecter du spectacle de son humiliation, savourer les regards parfois gênés, parfois lascifs : tout ceci n'avait aucune saveur jusqu'à son réveil. Par pure gourmandise et par pur triomphe, il ignore sciemment les deux présences qui se sont placées dans son dos. Tous restent silencieux un instant, et cela le ravit : que tous révèrent son triomphe, que tous en vénèrent la triste idole. Et que tous la malmènent.
« Hm... c'est une belle prise, Luisétoile. Mais était-il absolument nécessaire de...
– Oui. C'est un châtiment mesuré à l'aune de sa traîtrise, non ? » répond le concerné, d'un ton posé, presque innocent.
– Admettons, oui. Et quand bien même vous êtes à l'origine de sa capture, votre arrivée dans le service est relativement récente. Êtes vous sûr de vouloir mener...
– J'y tiens absolument.
– Bien… commençons. »

Les deux hommes considèrent le prêtre tandis qu'il s'approche de la captive. Ils ont beau connaître ses crimes et avoir été mis en garde contre sa faculté à manipuler, c'est bien Shelen, son calme et ses doux sourires qui les effraient le plus.
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Ael




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MessageSujet: Re: Eloge de la facilité   Eloge de la facilité EmptyDim 15 Jan - 20:50

Plus rien n'existe ici que la douleur et l'angoisse. L'angoisse plus forte que l'agonie, plus impérieuse que le craquement d'un os ou le déchirement de la peau. Parce que tout l'art du bourreau est là, exceller dans l'art sadique de l'anticipation.

Shelen ne prend pas part directement aux exercices physiques. Il ne la touche jamais, ou avec une extrême répugnance. Il faut dire que ce corps qui était le sien redevient ce qu'il n'a jamais cessé d'être : de la viande, des tendons, des sécrétions diverses, et l'angoisse pue.

En revanche, pour ce qu'elle pourrait certifier si le bourreau l'interrogeait à ce sujet, il ne s'est absenté que deux fois. Deux fois où curieusement, cette angoisse si intrinsèque aux attentions dont elle fait l'objet s'est vue démultipliée. Après tout, c'est pour lui faire plaisir qu'elle est là, n'est-ce pas ? Pour son pouls qui s'accélère ou sa respiration plus saccadée. Elle regrette qu'il ne la touche pas, pas directement. Mais elle doit faire bien peur à voir à présent. Guère mieux qu'une réprouvée, une carcasse qui bouge malgré tout.

Pourtant, quand bien même son corps se arque et que ce qui reste de raison vascille, son attention revient toujours au prêtre. Elle attend un signe, quelque chose qui lui dise qu'elle fait bien et qu'il est satisfait. Quelque chose qui lui dise qu'elle peut enfin se laisser aller suffisamment pour que le fil de sa vie échappe même au plus talentueux guérisseur. C'est important d'avoir un but, d'avoir un Maître. Que Shelen soit celui-là. Quand il pose avec la plus grande réluctance ses doigts gantés sur ses tempes pour fouiller à nouveau cet esprit qui se délite au rythme de sa chair, cette douleur là est presque un soulagement. Enfin, elle va pouvoir le servir, autant qu'elle le peut ! Mais c'est toujours déçu qu'il s'éloigne, et le coeur de la prêtresse se serre un peu plus. Non... elle n'est pas assez bien pour lui. Elle a pourtant dit ce qu'on cherchait à lui faire avouer. Plusieurs fois. Doit-elle dénoncer son maître ? Est-ce que cela lui ferait plaisir ?

Elle hésite à en devenir folle, plus folle qu'auparavant. Il est en colère contre elle. Peut-être n'a-t-elle pas eu assez mal ? Peut-être n'a-t-elle pas eu assez honte ?

Un soir, Ael regarde ce qui reste de ses mains, passe la langue sur ce qui reste de ses dents. Elle a été belle, jadis. Elle s'en souvient. Désirée toujours, aimée parfois et systématiquement gagnante. Elle savait comment s'y prendre, à l'époque. Elle était servante et maîtresse. C'était si simple. Peut-être... peut-être que si elle se laisse aller, complètement aller, alors elle sera belle à nouveau, séduisante comme le sont les secrets qu'on murmure ou les yeux mi-clos des chats. Ael, "aussi précieuse que...".

Elle ferme les paupières et, la respiration sifflante, sourit à l'ironie qui veut que même son nom soit une maladresse grammaticale. Après tout, il suffit juste de lâcher prise. C'est beaucoup plus facile qu'on ne le croit, mourir.
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MessageSujet: Re: Eloge de la facilité   Eloge de la facilité EmptyDim 15 Jan - 20:51

Elle a osé mourir.
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